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Cour de cassation, Chambre commerciale - AQUARELLE.com c/ SCT


Date de la décision

18-10-2023

N° de la décision

20-20.055

Type de jurisprudence

Marques

Pays

France

Juridiction

Cour de cassation, Chambre commerciale

Parties

AQUARELLE.com c/ SCT



Réservation d’une marque d’autrui à titre de mot-clé et usage au sein du code source d’un site internet : la contrefaçon n’est pas systématique.

Une société ayant pour activité la vente de fleurs et de plantes est titulaire de la marque verbale communautaire AQUARELLE pour les produits et services des classes 31, 35, 41 et 42 et de la marque verbale française AQUARELLE pour les services en classes 35, 38 et 42.

Cette société exerce son activité sur le site Internet <AQUARELLE.COM> depuis 1997, et a consenti en 2004 une licence non exclusive à la société AQUARELLE.COM sur ses marques pour une exploitation du site Internet éponyme.

Une seconde société, créée en 1986, est titulaire du nom de domaine <lebouquetdefleurs.com> depuis 2009, et exerce sur ce site Internet la même activité de vente de fleurs.

La titulaire et son licencié, ayant découvert que la seconde société avait réservé le mot clé “aquarelle” sur la plateforme GoogleAdwords, et ajouté à l’annonce de son site internet la mention “Site Officiel”, ainsi qu’une rubrique “Bouquet et Aquarelle” présentant des bouquets avec du matériel de peinture, l’ont assignée en contrefaçon, concurrence déloyale et atteinte à la renommée des marques susvisées.

Par un jugement du 12 octobre 2017, le Tribunal de grande instance de Paris a débouté les demanderesses de leurs demandes en contrefaçon de marque, mais a fait droit à leurs demandes au titre de la concurrence déloyale et parasitaire.

La titulaire et le licencié ont interjeté appel de ce jugement. Par un arrêt du 3 mars 2020, la Cour d’appel de Paris a confirmé le jugement en tous ses points, sauf en ce qu’il a rejeté les demandes au titre de la contrefaçon de la marque Aquarelle, résultant de la création d’une rubrique “Bouquet et Aquarelle”.

Considérant que l’usage de leur marque en tant que mot-clé réservé sur un moteur de recherche et au sein du code source d’un site Internet était contrefaisant, la titulaire et son licencié ont formé un pourvoi en cassation.

Par un arrêt du 18 octobre 2023, la Cour de cassation rejette le pourvoi, considérant qu’un titulaire peut interdire l’usage de sa marque au sein du code source d’un site Internet ou en tant que mot-clé réservé sur un moteur de recherche, afin de faire de la publicité pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, dans le seul cas où ladite publicité ne permet pas ou permet seulement difficilement à l’internaute moyen d’identifier la provenance des produits ou des services visés.

D’une part, s’agissant de la réservation du mot-clé Adwords “Aquarelle”, la Cour de cassation considère que la Cour d’appel a légalement justifié sa décision en écartant le risque de confusion pour l’internaute moyen. En effet, la Cour d’appel a légitimement observé que l’annonce litigieuse, bien qu’apparaissant en premier résultat après une recherche avec le mot-clé “Aquarelle”, était immédiatement suivie de l’annonce du site <Aquarelle.com> , et qu’il n’était fait aucun usage du signe “aquarelle ”, ni dans l’annonce elle-même, ni dans le lien, ni dans l’adresse URL du site litigieux.

D’autre part, s’agissant de l’utilisation du terme “Aquarelle” dans le code source du site Internet, la Cour de cassation rappelle que, contrairement à ce qui a été retenu par la Cour d’appel, le titulaire de la marque peut interdire l’utilisation d’un signe par un tiers dans le code source de son site internet, même s’il n’est pas visible aux yeux du public, dès lors qu’il propose comme résultat à la recherche d’un internaute une alternative par rapport aux produits ou services du titulaire de la marque et qu’il ne permet pas ou permet seulement difficilement à l’internaute moyen de savoir si les produits ou les services visés par le référencement naturel proviennent du titulaire de la marque ou d’une entreprise économiquement liée à celui-ci ou, au contraire, d’un tiers.