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Décision importante de la division centrale de Milan sur la question de la production tardive de documents ainsi que sur celle de la garantie pour frais (11 avril 2025, UPC_CFI_597/2024)

La division centrale de Milan de la Juridiction unifiée du brevet (JUB) a rendu, le 11 avril 2025, une décision importante sur la question de la production tardive de documents ainsi que sur celle de la garantie pour frais.

La division centrale de Milan de la Juridiction unifiée du brevet (JUB) a rendu, le 11 avril 2025, une décision importante sur la question de la production tardive de documents ainsi que sur celle de la garantie pour frais.

Le litige opposait la société sud-coréenne Eoflow Co., Ltd. à la société américaine Insulet Corporation concernant la contrefaçon alléguée du brevet européen EP 4 201 327 portant sur une pompe à insuline sous forme de patch (« Omnipod 5 »). Dans cette affaire, Eoflow avait d’abord été visée, en juillet 2024, par une mesure conservatoire ex parte demandée par Insulet pour faire cesser la commercialisation de sa pompe « EOPatch ». En réaction, Eoflow avait engagé, en octobre 2024, une action en révocation du brevet, à laquelle Insulet avait répliqué par une demande reconventionnelle en contrefaçon et, subsidiairement, par une requête en limitation du brevet invoqué.

Dans chacune des trois procédures, les parties ont échangé deux jeux d’écritures jusqu’au début du mois d’avril 2025. Dans ses dernières conclusions régularisées dans la procédure en révocation du brevet, Eoflow avait sollicité l’autorisation de produire un mémoire supplémentaire afin de commenter une décision d’appel récente et avait tenté, dans le même temps, d’introduire un nouveau document, le brevet américain (US 6 656 159), comme nouvel état de la technique. Insulet avait, en parallèle, invoqué la situation financière fragile de son adversaire pour demander à ce qu’il lui soit ordonné de consigner une somme d’un million d’euros à titre de garantie pour frais.

Dans son ordonnance, la division centrale rappelle tout d’abord que la procédure devant la JUB est de nature front loaded, expliquant que « cela signifie que chaque fois qu’une partie envisage d’intenter une action devant la JUB, elle doit veiller à rassembler à l’avance les documents à l’appui de sa demande ». Tous les éléments de preuves, et en particulier ceux relatifs à l’état de la technique dans le cadre d’une action en révocation, doivent donc être réunis avant l’engagement de l’action et déposés dès l’acte introductif. A défaut, ils ne pourront pas l’être à un stade avancé sauf à démontrer que les documents en question n’étaient pas disponibles ou qu’ils ne pouvaient pas être soumis avant.

N’ayant, en l’espèce, pas démontré qu’il avait été matériellement impossible à Eoflow de produire plus tôt le brevet US 6 656 159 qu’elle n’avait même pas mentionné jusque-là et qui n’était pas invoqué en réponse à de nouveaux arguments adverses, ce nouveau document est déclaré irrecevable et la division centrale prononce la clôture de la procédure écrite, fixe une conférence intermédiaire dont elle cadre précisément les modalités, la langue, l’objet et le déroulé, ainsi que la date de l’audience de plaidoiries.

Dans cette décision, il est intéressant de relever que la division centrale s’est également prononcée sur la demande de garantie pour frais formée par Insulet, demandeur à la contrefaçon, au regard de ses doutes sur la capacité du défendeur à payer les frais de procédure dans l’hypothèse où il serait condamné.

En réponse, Eoflow avait opposé que seuls les défendeurs pourraient former une telle demande en application des dispositions de l’article 69 (4) de l’Accord sur une la juridiction unifiée du brevet, de la règle 158 du Règlement de procédure de la JUB, et également de l’article 6 de la CEDH et de l’article 42 de l’Accord ADPIC, sauf à faire supporter au défendeur une pression financière inacceptable.

La division centrale rappelle, sur ce point, que la fourniture de cette garantie peut être ordonnée à toute partie lorsque des doutes sérieux pèsent sur sa capacité financière à payer les frais de la procédure qu’elle pourrait être amenée à supporter, et ce, même si cette partie est défenderesse.

Au vu des indicateurs financiers produits, en l’espèce, par Insulet et non sérieusement contestés par Eoflow, la division centrale fait droit à la demande de consignation et ordonne à Eoflow de consigner dans un délai de trois semaines la somme de 500 000 €, soit la moitié du plafond des frais recouvrables, en précisant qu’en cas de difficultés une extension de délai pourra être sollicitée, et qu’à défaut de paiement, la division centrale pourra statuer par défaut conformément à la règle 355 du Règlement de procédure de la JUB.

Plus d’informations sur www.upc-casalonga.eu.