casalonga logo

OEB - L’OREAL c/ HENKEL AG & Co. KGaA


Date de la décision

15-02-2013

Type de jurisprudence

Brevets

Juridiction

Divison d’Opposition - OEB

Parties

L’OREAL / HENKEL AG & Co. KGaA



L’opposante, la société L’OREAL, était représentée par Gérard Dossmann, Mandataire en brevets européens. La décision de la Division d’Opposition est totalement favorable à l’opposante L’OREAL et révoque le brevet de HENKEL pour défaut de nouveauté et d’activité inventive.

L’invention objet de la revendication 1 du brevet européen No. 0 875 236 de la société HENKEL concerne l’utilisation d’une préparation aqueuse pour traiter des fibres kératiniques, en particulier des cheveux humains, contenant au moins un ingrédient naturel ou synthétique, ayant la note de parfum d’un produit alimentaire ou d’un produit de consommation d’agrément, ladite préparation étant caractérisée par le fait qu’elle contient en outre 0,0005 à 0,1 % en poids d’une substance amère, qui présente une masse molaire d’au moins 250 g/mole et qui est soluble dans la préparation à 20°C à raison d’au moins 10 mg/l.

Le principal objectif de l’invention est de sélectionner des substances amères particulières afin de les introduire dans des compositions contenant un ingrédient ayant une note parfumée d’un produit alimentaire ou d’un produit de consommation d’agrément pour, d’une part, éviter les ingestions indésirables et, d’autre part, ne pas altérer la note parfumée dudit ingrédient. De telles compositions sont notamment des shampooings qui, grâce à leur note parfumée et à la présence d’une substance amère particulière, permettent de nettoyer les cheveux des enfants en toute sécurité sans risque d’ingestion.

L’opposante, la société L’OREAL, a notamment soulevé le défaut de nouveauté de cette revendication en citant l’exemple 1 du document WO 97/36569. Cet exemple porte sur une composition cosmétique utilisée pour traiter des cils (donc des fibres kératiniques) comprenant de l’eau, 0,08 % en poids d’une substance amère et un produit vendu sous la dénomination Nipaguard BPX contenant notamment du phénoxyéthanol.

Au cours de la procédure d’opposition, l’opposante a apporté la preuve que le phénoxyéthanol présente une odeur de rose et qu’il procure, par conséquent, une note de parfum d’un produit alimentaire ou d’un produit alimentaire d’agrément.

Sur le fondement de cette argumentation, la Division d’Opposition a considéré que la revendication 1 n’était pas nouvelle.

Afin de se démarquer de cet art antérieur, la titulaire a déposé une requête auxiliaire en précisant la nature de la note parfumée. Ainsi, la requête auxiliaire précise que la composition comprend un ingrédient ayant une note parfumée d’un produit alimentaire choisi parmi les fruits ou d’un produit de consommation d’agrément choisi parmi le tabac, le cola, le guarana, le chocolat, le cacao, la mente poivrée et le rhum.

Cette modification de la revendication a permis de surmonter l’objection de défaut de nouveauté.

En ce qui concerne l’activité inventive, une brochure, divulguant l’utilisation de substances amères dans des compositions aqueuses pour traiter les cheveux, notamment dans des shampooings parfumés, a été considérée comme étant l’état de la technique le plus proche, c’est-à-dire le meilleur point de départ pour arriver à l’invention définie dans la requête auxiliaire.

Afin de démontrer l’activité inventive de son invention, la titulaire s’est fondée sur des essais comparatifs montrant qu’une substance amère telle que revendiquée ne modifiait pas de manière significative le parfum d’une composition contenant un ingrédient ayant une note parfumée d’abricot ou de fraise.

La Division d’Opposition a fait remarquer que l’appréciation des testeurs varie considérablement entre l’ingrédient ayant la note parfumée d’abricot (87,5% de satisfaction) et l’ingrédient ayant la note parfumée de fraise (50% de satisfaction) ce qui signifie que l’effet technique argué par la titulaire ne peut être extrapolé à l’ensemble des ingrédients ayant les notes parfumées revendiquées.

En d’autres termes, les essais de la titulaire ne montrent pas de manière convaincante que toutes les compositions revendiquées sont susceptibles de conduire à un effet technique par rapport à l’état de la technique le plus proche.

Par conséquent, le problème technique n’est pas une amélioration mais consiste à développer d’autres compositions aqueuses pour traiter des cheveux contenant des substances amères et des ingrédients ayant des notes parfumées alternatives à celles existant dans l’état de la technique le plus proche.

La Division d’Opposition a dès lors considéré qu’il était évident pour un homme du métier d’utiliser les ingrédients parfumés mentionnés dans les différents documents cités dans des compositions aqueuses contenant déjà des substances amères.

Cette décision met en exergue l’importance de déposer des tests capables de démontrer de manière convaincante qu’un effet technique, observé dans le cas d’une expérience précise, peut être extrapolé à l’ensemble des composés définis dans la revendication. En l’absence d’une telle démonstration, le problème technique ne peut pas être reformulé comme étant une amélioration technique par rapport à l’art antérieur mais comme étant une simple alternative.

En l’espèce, les essais de la titulaire induisaient un doute quant à la possibilité de pouvoir extrapoler l’effet technique sur l’ensemble de la revendication 1.

La décision de la Division d’Opposition n’a pas fait l’objet d’un recours et est donc définitive.